
Analyse des lacunes actuelles en matière de soins, du fardeau de la maladie et de l'appel collectif à l'action lancé lors de la première table ronde politique sur l'obésité au Québec.
L’obésité au Québec : Une maladie non reconnue
Au Québec, l’obésité n’est toujours pas officiellement reconnue comme une maladie.
Pourtant, plus de 30 % de la population—environ 3 millions de Québécois—vivent avec cette condition chronique qui affecte profondément leur santé et leur qualité de vie.
Fardeau de la maladie
Définition de l’obésité : C’est une maladie chronique caractérisée par l’accumulation d’un excès de graisse corporelle susceptible de nuire à notre santé physique, mentale ou métabolique et à notre qualité de vie globale.
Les complications incluent notamment le diabète de type 2, les maladies cardiovasculaires, et certains cancers. En effet, l’obésité est un facteur de risque pour plus de 200 pathologies. Cette réalité pèse non seulement sur l’espérance de vie, mais elle influence également la qualité de vie de ces personnes et le stigma social qu’elles subissent.
L’impact économique est considérable:
Un fardeau fiscal total de 23 milliards $ en 2021 pour le gouvernement québécois.
Une réduction de seulement 1% de la prévalence de l’obésité générerait des gains fiscaux nets estimés à 230 millions $ annuellement – un retour sur investissement significatif pour toute politique de santé efficace.
Accès aux traitements: un décalage avec les standards internationaux
Le Québec adopte une approche qui diverge significativement des lignes directrices internationales telle que l’Organisation mondiale de la santé (OMS), l’Association médicale américaine (AMA) et l’Association médicale canadienne (AMC) en matière de prise en charge de l’obésité:
- Standard mondial en évolution : The Lancet Diabètes & Endocrinology a récemment proposé une nouvelle définition de l’obésité, qui va au-delà de la simple mesure de l’indice de masse corporelle (IMC) et exigeant des traitements accessibles. De plus, l’Alberta est devenue la première province canadienne à reconnaître officiellement l’obésité comme une maladie.
- Orientation actuelle au Québec : Priorité aux changements d’habitudes de vie, avec intervention limitée et traitements thérapeutiques inaccessibles dans le système public.
- Exclusion systématique : Les traitements pharmaceutiques sont explicitement exclus du régime public d’assurance médicaments (article 6.3, annexe 1, Liste de médicaments RAMQ)
- Barrière évaluative : Contrairement à l’Agence des médicaments du Canada (AMC), l’INESSS considère ces traitements comme non éligibles à l’évaluation pour recommandation d’inclusion aux listes de médicaments remboursés.
Table ronde politique au Québec : Un appel à l’action pour des soins équitables en matière d’obésité
Face au manque persistant de reconnaissance de l’obésité comme maladie et à l’accès limité aux traitements au Québec, Parlons Obésité, la division francophone de Obesity Matters, a organisé une table ronde politique le 12 décembre 2024. L’événement a rassemblé des professionnels de la santé, des défenseurs des droits des patients, des économistes, des experts en affaires publiques, des représentants de l’industrie et des proches aidants afin d’explorer des solutions concrètes et d’amorcer le changement.
Changer le discours sur l’obésité
Les participants ont souligné l’importance de modifier le récit dominant — en s’éloignant des perceptions dépassées qui présentent l’obésité comme un simple choix personnel, pour la reconnaître plutôt comme une maladie chronique complexe. Le langage utilisé dans les médias et le discours politique doit refléter cette réalité afin de réduire la stigmatisation et d’encourager un changement significatif.
Améliorer l’accès à des soins complets
Les échanges ont mis en lumière l’urgence de garantir un accès équitable à des soins complets, incluant la pharmacothérapie et les services de chirurgie bariatrique. Les solutions proposées comprennent notamment :
- Des projets pilotes ciblés dans les régions mal desservies ;
- La création d’un groupe de travail conjoint (MSSS, INESSS, patients et cliniciens) pour optimiser le financement et l’offre de soins.
Sensibilisation et mobilisation politique
Deux stratégies clés ont été identifiées :
Éducation : Lancer des campagnes publiques qui mettent en lumière les conséquences cliniques de l’obésité non traitée, tout en plaçant les témoignages de patients au cœur du message.
Plaidoyer politique : Miser sur des arguments économiques convaincants, demander le retrait de l’article 6.3 de la Liste des médicaments de la RAMQ et permettre à l’INESSS d’évaluer les traitements contre l’obésité.
Une voie à suivre
Les participants recommandent de maintenir un engagement soutenu auprès des élus, en l’alignant avec les moments stratégiques du calendrier politique (ex. : dépôts budgétaires, sessions parlementaires, périodes préélectorales).
Ils proposent également :
- L’organisation d’un événement de sensibilisation à l’Assemblée nationale ;
- La tenue d’une commission publique provinciale sur l’obésité, inspirée des États généraux sur la lutte contre le cancer au Québec.
À propos de Parlons Obésité
Parlons Obésité est la division francophone de Obesity Matters — la première organisation centrée sur les patients vivant avec l’obésité au Québec et à travers le Canada.
Notre mission est de promouvoir la compassion, l’autonomisation et l’équité en santé en :
- Reconnaissant l’obésité comme une maladie chronique, et
- Assurant un accès à des soins complets et multidisciplinaires.
Nous œuvrons par le biais du plaidoyer, de l’éducation et de l’engagement communautaire afin de bâtir un système de santé plus inclusif et respectueux pour tous.